Confiance en soi et estime de soi : comment se construisent-elles ?
Une distinction essentielle
On confond souvent confiance en soi et estime de soi. Pourtant, ces deux concepts, bien que liés, désignent des réalités psychiques différentes. L’estime de soi renvoie à la valeur que l’on s’attribue, de manière relativement stable. Elle se construit dès l’enfance à travers le regard des figures d’attachement, le sentiment d’être digne d’amour et de reconnaissance. La confiance en soi, elle, désigne une capacité plus dynamique : celle d’agir malgré l’incertitude, de tenter quelque chose même si l’on n’est pas sûr du résultat.
Charles Pépin résume bien cette différence dans son ouvrage La confiance en soi :
« Avoir confiance en soi, ce n’est pas croire que l’on est parfait. C’est accepter de ne pas l’être, mais agir quand même. »
L’estime de soi peut se développer dans le silence et l’introspection. La confiance en soi, elle, se déploie dans le mouvement, l’action, la rencontre. Elle est moins une certitude qu’un élan.
Une construction progressive, jamais acquise une fois pour toutes
On n’a pas confiance en soi comme on possède un objet. La confiance se construit, se renforce, se perd parfois, puis se reconquiert. Elle ne relève pas d’un don, mais d’une dynamique intérieure soutenue par l’environnement. C’est une construction relationnelle et existentielle.
Charles Pépin insiste sur cette dimension évolutive. Il y distingue trois sources essentielles de confiance en soi :
La confiance en l’autre : pour oser, il faut d’abord avoir été autorisé à le faire. Les regards encourageants de nos parents, professeurs ou mentors nourrissent notre confiance initiale. Même à l’âge adulte, des liens soutenants facilitent nos prises de risque.
La confiance en l’expérience : plus on agit, plus on apprend, et plus on renforce cette confiance. L’action précède souvent la confiance. Pépin dit : « Il faut agir pour avoir confiance. »
La confiance en la vie : c’est cette part de foi qui nous pousse à croire qu’un échec n’est pas une fin. La vie ne se résume pas à des résultats immédiats. Elle offre d’autres chances, d’autres chemins. Cette confiance-là nous donne la capacité de rebondir.
Ces trois dimensions s’entrelacent. Sans confiance en l’autre, difficile de se lancer. Sans expérience, difficile de progresser. Sans confiance en la vie, difficile de recommencer après un échec.
Les racines précoces de l’estime de soi
L’estime de soi, elle, s’enracine dans les premières interactions. Le bébé construit une image de lui à partir du regard de ses proches. Winnicott, pédiatre et psychanalyste, évoque le « miroir maternel » : l’enfant découvre qui il est à travers les réactions de celle ou celui qui s’occupe de lui.
Si l’enfant se sent accueilli tel qu’il est, aimé sans condition, ses bases narcissiques sont solides. Il pourra s’autoriser à se tromper sans s’effondrer. Mais si, au contraire, l’amour reçu est conditionné à la réussite, la conformité ou la performance, il développera une estime de lui fragile, dépendante du regard extérieur.
Cette estime de soi vacillante peut freiner l’élan de confiance. Si je me crois indigne ou inintéressant, comment oser proposer une idée, prendre la parole ou tenter quelque chose de nouveau ?
Pourtant, même une estime de soi endommagée peut être réparée, notamment à travers une relation thérapeutique, un cadre bienveillant ou des expériences positives répétées. L’estime de soi, comme la confiance, peut se reconstruire.
Les obstacles à la confiance
Certains contextes freinent, voire détruisent la confiance en soi. Des humiliations répétées, un environnement violent ou hypercritique, un cadre scolaire compétitif ou moqueur, peuvent figer la personne dans l’évitement ou la peur de l’échec.
Les injonctions sociales, aujourd’hui très fortes, n’arrangent rien. On doit être performant, sociable, dynamique, productif. Cette pression peut renforcer un sentiment d’imposture ou de honte de ne pas être « à la hauteur ».
La comparaison constante sur les réseaux sociaux accentue ces mécanismes. On se compare à des images idéalisées, filtrées, parfaites. Et l’on en déduit que l’on est, soi, imparfait, trop ceci ou pas assez cela.
Pour restaurer sa confiance, il est parfois nécessaire de faire silence autour de soi. Se recentrer, sortir de la comparaison. Se relier à ses besoins propres, à son rythme, à ses expériences.
Comment se construit la confiance en soi ? Quelques leviers concrets
La confiance en soi ne tombe pas du ciel. Elle se cultive, comme une plante fragile, avec soin et patience. Voici plusieurs leviers efficaces, ancrés dans les apports de Charles Pépin, la psychologie, et l’expérience clinique.
1. S’autoriser à essayer, même imparfaitement
Attendre d’être prêt ou parfait pour se lancer est un piège. La confiance vient en marchant. On n’est jamais totalement prêt à parler en public, créer un projet ou demander quelque chose d’important. Il faut parfois faire un pas, puis le suivant.
« La confiance en soi, c’est la capacité d’avancer dans le brouillard, avec lucidité mais sans panique », écrit Pépin.
Cela implique d’accepter l’imperfection. Ce n’est pas grave de rater. Le plus important, c’est d’agir.
2. S’appuyer sur des réussites passées
Même minimes. Un bon échange, un moment où l’on a osé dire non, une présentation qui s’est bien passée, une relation où l’on s’est senti respecté. Ces expériences constituent un socle.
Les noter, les relire, les ressentir. Elles montrent que l’on est capable. Même si ce ne sont pas des exploits, elles sont précieuses.
3. S’entourer de personnes soutenantes
Un entourage encourageant peut transformer notre rapport à nous-mêmes. Il ne s’agit pas de trouver des personnes qui flattent, mais de celles qui croient en nous, nous aident à voir nos forces et nous relèvent quand on doute.
C’est aussi valable en thérapie. Le lien avec un·e thérapeute peut permettre à une personne de réinvestir son potentiel, de s’autoriser à être et à faire.
4. Se donner des objectifs réalistes
Commencer petit. Ne pas viser tout de suite la perfection ou la transformation radicale. Réussir un pas aujourd’hui. Se féliciter. Puis un autre pas demain. La confiance se construit par paliers.
5. Travailler le corps et le souffle
Le corps ne ment pas. Se redresser, respirer profondément, marcher d’un pas assuré : ces gestes simples peuvent déjà modifier l’état intérieur. Le yoga, la danse, le sport, ou simplement la marche, favorisent l’ancrage et renforcent l’élan vital.
6. Apprivoiser l’échec
L’échec n’est pas une fin. Il est un apprentissage, une étape. C’est l’un des grands enseignements de Charles Pépin. L’échec fait partie du chemin. Plus on ose, plus on échoue parfois. Mais plus on progresse aussi.
Apprendre à lire l’échec autrement, à s’en servir, à ne pas s’y réduire, c’est une clef essentielle.
7. S’inscrire dans une temporalité plus large
La confiance en soi peut fluctuer selon les moments, les contextes. Ce n’est pas une donnée figée. Elle grandit avec le temps, à condition d’être nourrie. Il faut apprendre à se voir en devenir, à sortir du jugement immédiat.
Et si la confiance en soi, c’était aussi un rapport à l’inconnu ?
Pépin insiste sur une idée forte : la confiance n’est pas la certitude. C’est un pari. Avoir confiance en soi, c’est oser s’engager dans ce que l’on ne maîtrise pas encore. C’est croire qu’on pourra faire face, quoi qu’il arrive.
Ce rapport à l’inconnu distingue la confiance de l’arrogance. L’arrogant pense qu’il sait tout. Celui qui a confiance accepte de ne pas tout savoir, mais avance quand même.
Ce n’est pas une posture de surpuissance. C’est une disposition intérieure faite d’humilité, de courage et d’espoir.
En conclusion : une invitation à vivre
Travailler sa confiance en soi, c’est réinvestir le lien au monde, aux autres, à soi. C’est sortir de la passivité, du repli ou de la peur du jugement. Ce n’est pas s’imposer ni écraser les autres, mais oser être pleinement soi.
Ce travail demande du temps, du soutien parfois, de la bienveillance souvent. Il ne s’agit pas de devenir sûr de soi en toute circonstance, mais d’oser faire, dire, essayer, aimer, créer.
L’estime de soi fournit la base. La confiance en soi permet le mouvement.
Et comme le dit si bien Charles Pépin :
« Ce n’est pas parce que c’est difficile qu’on n’ose pas. C’est parce qu’on n’ose pas que c’est difficile. »
Et voici une vidéo qui approfondit le sujet de l’estime de soi :
Voici une autre vidéo sur la confiance en soi :
et un conseil lecture:

« La confiance en soi » de Charles Pépin